15/03/2012

Guitare & claviers - 1986 : votez Jarre

1985 : Zoolook et son auteur, album et musicien de l’année
Au lendemain de son succès aux Victoires, le prince des synthés fait un bilan rapide.
Guitare & Claviers. 1985, c ‘est une année Jarre avec, en dernier lieu, une Victoire
Jean-Michel Jarre. J’ai eu très peur d’être en compétition avec Jouvin et Caravelli, quand tu sais que ce sont les professionnels qui votent on peut s’attendre à tout
- Larousse, à Beaubourg, pour célébrer la parution de la 5e édition de l’Encyclopédie – Pour quelqu’un qui écrit beaucoup de textes comme moi, c’est quelque chose qui compte dans une vie. Trêve de plaisanterie, le spectacle était très bien . Beaubourg avec 21 écrans accrochés, c’est gonflé. En fait, cette manifestation avec Larousse me servait de répétition pour quelques projets…

 - Tu participais également aux 7 d’or…
- Très important; un grand moment, il y avait long temps que je désirais rencontrer Bécassine. J’étais ravi
- Accessoirement, il y a eu « Zoolook » que certains, les niais, considèrent comme l’album de l’année
- C’est secondaire. J’ai eu beaucoup de choses à faire en dehors de cet album. Mais pour mon image, ce n’était pas mal de sévir dans d’autres domaines, comme le disque. Comprenez-moi, cher ami, faire un disque ça peut aider.


 - Certes, mais Zoolook, le titre lui-même, ne participe-t-il pas d’un appauvrissement de notre beau langage ?
- Ah bon ? Non, c’est complètement français. Mais si certains y entendaient des phonèmes étrangers, cela permettait d’imposer une image libérale ; quelqu’un d’ouvert aux influences extérieures. Peut-être aurais-je dû titrer cet album « Jardin d’Acclimatation regard » ?
- Pourquoi Zoolook ?



 - Je cherchais quelque chose qui soit bref et « sensé « . Ca m’est venu en revoyant Oranges Mécaniques. Les vocables de Burgess sont à la fois complètement fabriqués et complètement naturels leur force vient du décalage entre le sens qu’ils ont habituellement et le sens que Burgess leur donne. Mieux, cela posait un langage très rock avant la lettre. Burgess se montrait très punk avec dix ans d’avance.
- « Zoolook » a entraîné pas mal de réactions, le plus souvent élogieuses. Quelles ont été celles que tu as le plus appréciées ?
- Ton collègue américain, Keyboard Magazine, considérant  » Zoolook » comme le meilleur album instrumental de l’année, ne me laisse pas indifférent. Les réactions d’artistes que je ne connaissais pas m’ont conforté. Cyndi Lauper, Mick Jones de Foreigner, Mick Jagger, Toto notamment François Kervakian, I’ingénieur du son de Jagger, d’Eurythmics, de Thompson Twins, a appelé le bureau en demandant la permission de remixer I’album ! II voulait remixer certains passages pour lui. En fait, les professionnels ont réagi à ce disque. Et leur avis m’a beaucoup touché.

 - « Zoolook », réalisé en grande partie avec des sons échantillonnés, relevait du défi.
- J’avais envie depuis long temps de le faire. Ca correspondait à une idée que j’avais, bien avant que les machines ne le permettent. Déjà au GRM, je ressentais ce besoin. De plus, je voulais traiter des voix. Sur ce plan, travailler avec Laurie Anderson a été un grand plaisir. (Comme Marcus Miller, que je place très haut dans les musiciens que j’aime.)
- La compilation « 10 ans de Jarre » elle est retravaillée ?
- Non, je préfère laisser les enregistrements originaux pour qu’on ait une idée du chemin accompli. Seuls les masters ont été retraités en digital.
- II y a sûrement pourtant des choses que tu aurais aime retoucher


 - A une époque, je remixais beaucoup. Les rééditions n’étaient pas les mêmes. A chaque fois, je fignolais, je retouchais, je remixais « Oxygène », il y avait au moins sept mixages différents dans le commerce. En revanche, dans le cas d’une compilation, il faut jouer le jeu du « son d’époque ». Tout refaire aurait été une tricherie.
- Apres dix ans de métier, as-tu des regrets ? Referais-tu les mêmes choses ?
- Je signerais avec la même maison de disques. Le trajet de Francis Dreyfus est quelque chose d’unique. C’est le Corti du disque. En ce qui concerne les disques, tous m’ont amené quelque chose; les concerts aussi. Toute expérience m’a permis d’évoluer. Même les plus malheureuses. Je ne peux rien renier. Pourtant, a posteriori, j’émets souvent un jugement négatif . j’aurais dû faire ceci, j’aurais dû reprendre cela. A la limite, je serais prêt à tout refaire. Je ne peux pas isoler une chose par rapport à une autre. Tout se tient. Par exemple, à I’époque de « Chants magnétiques», j’avais bouleversé mon studio. J’ai eu un problème de son que je n’ai pas immédiatement appréhendé. Finalement, le son n’était pas celui que j’attendais mais il était intéressant. Et ce son m’a aidé pour d’autres réalisations Des événements mineurs peuvent être déterminants pour I’étape suivante. Le concert pour le concert ne m’intéresse pas. Au reste, le genre de musique que je fais réclame autre chose. Etre là, appuyer sur une touche et déclencher un cataclysme. Le spectateur, I’auditeur, ne comprend pas. Ici, autour d’une table, on a les meilleures idées du monde. Les mots, les idées, ça va. Reste la matérialisation. Et là, on pèche, sérieusement. En revanche, les Américains, les Anglais n’ont peut-être pas d’aussi bonnes idées mais eux, forcenés de la réalisation, mènent à bien, concrètement, leur projet. La Chine a plus compté comme performance que comme spectacle en soi. L’avoir fait compte plus que ce qu’on a fait. Paringaux dans Rock & Folk I’avait vu assez justement. Je ne regrette pas. J’analyse ce qui aurait pu être amélioré.

 - Tu ne regrettes aucune amitié phonographique ?
- Je ne raisonne pas comme ça. Quand j’ai décidé de faire, j’assume. Jusqu’au bout Je ne regrette rien, quoi que ça ait donné. Dans des associations avec Christophe ou Juvet, il y avait beaucoup de positif. II y avait aussi des points négatifs. Mais ça m’a énormément apporté. Et puis, ça peut te donner moins envie de faire certaines choses
- Le après  » Zoolook » ?

 Zoolook  » m’a permis de me débarrasser de tas de choses Les sons acoustiques, pour le prochain, je m’en passerai. J’ai eu beaucoup de plaisir ales avoir. Or, j’ai envie d’autres choses. Le prochain album sera totalement électronique. Sinon, il est très difficile de ne pas utiliser des cliches, les cuivres de Earth, Wind and Fire, les batteries de Phil Coilins, etc. Je veux revenir a des sons purement électroniques. Peu de sampling; le sampling, I’échantillonnage s’inscrit dans une dynamique qui est à I’opposée du synthétiseur analogique. Extraire des sons naturels et les modifier te pousse à faire des monstres. Comme en dessin, déformer le visage de quelqu’un t’amène à le rendre monstrueux. En ça, I’échantillonnage est dangereux. Alors que le son électronique détient un grand pouvoir évocateur parce qu’il ne rappelle rien. II ne limite pas ton inspiration. Donc le prochain album n’aura rien à voir avec « Zoolook  » Cependant, j’exploiterai toutes les possibilités. J’attends beaucoup d’un synthé canadien que I’on verra vers le mois d’avril, le Technos, qui permet les synthèses additives, soustractives, ainsi que I’échantillonnage

 - Tu es un fou de matériel ?
- J’essaie tout ce qui bouge. Music Land me passe ce qui sort. J’essaie, je vois, je garde ou je rends, selon Mais, autant je suis passion ne par le matériel, autant je reste méfiant Surtout par rapport aux gadgets qui doivent solutionner tous les problèmes. Ils rendent les choses plus compliquées. Le principe du defectron.. Les fabricants m’envoient régulièrement des informations. Je suis une victime du prospectus. Ma boite à lettres est emplie d’instruments en tout genre. De toute façon, et a priori, j’ai un préjugé favorable envers les instruments qu’on me déconseille. « Non, ne prends pas 9a, c’est de la merde ». D’emblée, je trouve le truc sympa. J’aime bien les synthés italiens. Le Synthex est, à mon avis, un des meilleurs synthés polyphoniques analogiques du monde. OBX et Prophet peuvent s’accrocher, le son du Synthex est très beau. Et puis ii y a un côté spaghetti, marino marini, qu’on trouve nulle part ailleurs.
- Hohner Electronique devrait présenter un synthé important au début de l’année. Serais-tu prêt a le découvrir en avant-première pour nous et à donner ton avis ?
- Tout a fait. Je l’avais fait au Japon, pour Seiko. Le principe était trop bâtard. Dun côté un synthé de Prisunic et de l’autre un module qui permettait de visualiser et de concevoir des enveloppes à une vitesse époustouflante. C’ était moins bon que les bas de gamme à 50% et le reste intéressait les professionnels une machine mal ciblée. Je nai aucun a priorl j’éspère que Hohner sortira un synthé révolutionnaire. Je serai heureux d’assister à sa naissance. Quand tu vois qu’au beau milieu du désert australien, de jeunes  » luthiers  » sortent des engins faramineux très en avance .

 - Tu te fabriques des instruments ?
- Je travaille beaucoup avec Michel Geiss Electronicien. II ma conçu des appareils que j’utilise encore. Notamment un séquenceur le Matrisequenceur une matrice de 2000 points qui fonctionne à l’aide d’aiguilles. En temps réel, tu peux modifier ce que tu as écrit en pas à pas etc. II y avait aussi une boite à rythmes. une des premières synchronisables. En ce moment je suis en train de me faire faire deux générateurs d’enveloppes à 16 paramètres graphiques. Au reste tous les instruments que Je possède ont été modifies. Même le Fairlight est modifié
- Tu accepterais de prêter ton nom a du matériel ?

 - OUl s’il ya un réel dialogue entre le constructeur et moi. Non si je signe l’autorisation que I’on utilise mon nom sans que j’aie quoi que ce soit à voir dans I’ élaboration du produit
- Tu reçois sûrement des cassettes de jeunes auteurs ?

























 - Beaucoup et je ne peux pas toujours répondre. Je les écoute toutes Actuellement le reçois des bandes de gens qui refont  » Les Concerts en Chine »  » Zoolook  » C est une situation piège. Je me sens oblige de répondre et souvent je ne sais pas quoi répondre. C’est difficile. Je vais dire ce qu’on ma dit quand. Je présentais mes bandes. Pourquoi t’as pas fait ça pourquoi t’as pas employé plutôt tel synthé etc. Des connerles grosses comme moi quand on fait un truc c est bien de l’envoyer va aidé moralement. Mais iI ne faut rien attendre du conseilleur ou si peu.










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