31/08/2014
20/08/2014
De Pink Floyd à Vitalic, des concerts bien allumés
09/08/2014
Fini le chanteur éclairé seul dans son rond de lumière... Pink Floyd dans les années 1970, Jean-Michel Jarre dix ans plus tard inventent les shows dopés aux effets lumineux. Coup de projecteur sur une révolution qui a vu le spectacle voler la vedette aux artistes.
« Si tu nous faisais un light show ?
— Un quoi ?
— Des projections lumineuses, des pulsations de couleurs qui vibrent au même rythme que la musique. J'ai vu faire ça en Angleterre, je peux t'expliquer en gros comment on procède. »
Nous sommes en 1970, et Bernard Szajner ne sait pas encore qu'il deviendra bientôt le créateur des lumières de Gong et Magma (groupes historiques du rock progressif), et l'inventeur de la harpe laser, l'instrument lumineux fétiche de Jean-Michel Jarre. Pour l'instant, il discute avec son ami Karel Beer (1), manager d'un groupe de rock, et bricole dans sa cuisine des perruques en fibre de verre qui n'intéressent que lui.
Le manager a raison : en Angleterre, les light shows ont la cote depuis que Pink Floyd a décidé d'inverser les codes du concert. Ce n'est plus le chanteur qui est la vedette, mais le spectacle. Au placard Mick Jagger et autres sex-symbols envahissants. Le rock a envie d'expérience, de sensations, d'en avoir plein la vue. A Londres, le 29 avril 1967, la crème du psychédélisme a célébré « Quatorze heures de rêve en Technicolor » pour soutenir une revue underground. Au centre du vénérable Alexandra Palace trônait une tour de lumière, et la foule a dansé toute la nuit devant des écrans géants. On y diffusait Flaming Creatures, un film expérimental de Jack Smith. La même année, au club UFO, à chaque concert du Floyd, l'architecte Mike Leonard teste ses lentilles kaléidoscopiques et Peter Wynne-Willson, ses lampes à huile. Au fond de la scène, des bulles de couleur éclatent en mille particules, les musiciens jouent avec leurs ombres portées. Le public, qui ne boude pas le LSD, ouvre les portes de la perception.
« Pendant des années, on avait séparé le son et la lumière, et voilà qu'ils se mariaient pour nous impressionner, pour créer l'illusion, s'enthousiasme Bernard Szajner, exactement comme les hommes des cavernes avec leurs torches ou les cérémonies de prêtres égyptiens. On le sait, la fusion des deux stimule la zone du plaisir dans le cerveau. » Alors qu'on redécouvre son travail lumineux et musical (2), quarante ans après ses débuts dans le light show, Szajner insiste pour rendre hommage aux pionniers du genre : « Sans le savoir, nous réinventions le travail d'Etienne-Gaspard Robertson, le créateur des fantasmagories sous la Révolution française, qui faisait surgir des fantômes avec de la fumée. Nous, nous mélangions des encres, de l'éther et de la glycérine sur des plaques de verre, jouions avec la persistance rétinienne, ajoutions des effets de rotation aux lanternes magiques. Soudain, l'ombre d'un musicien devenait gigantesque, effrayante. » En 1970, la technique lumineuse est presque aussi rudimentaire qu'au XVIIIe siècle, mais bientôt des moyens nouveaux décupleront ses possibilités.
« La vraie révolution du light show est arrivée avec les lampes “aircraft”, celles qui permettent aux avions d'atterrir. Elles sont petites mais ultrapuissantes », se souvient Jacques Rouveyrollis. Lui aussi maniait les ampoules vernies maison, lorsqu'il éclairait les Jelly Roll à Fréjus, en 1965. C'était avant que Michel Polnareff ne l'engage pour huit ans : « Il avait compris que les gens ne se contentaient plus d'un chanteur devant un rideau. » Le travail de Jacques Rouveyrollis, éclairagiste de Johnny, Barbara et tous les grands noms de la chanson française, accompagnera les progrès technologiques. Ils s'enchaînent à la vitesse de l'éclair.
L'ennui pourtant gagne peu à peu l'univers du light show. A la fin des années 1990, le rock, lassé du show-business, revient à l'état brut avec le grunge. « Pour vivre heureux, vivons cachés », proclame la techno naissante, qui à l'époque tient à distance l'héritage de Jean-Michel Jarre. Mais l'euphorie des raves, du public star et de la grande communion n'a qu'un temps. Pour vivre de leur musique, les musiciens électroniques doivent exister sur scène, offrir un spectacle. Peu à peu, ils retournent donc vers la lumière.
Le XXIe siècle a commencé. L'ère du numérique, d'Internet, du collectif… et de la crise du disque. Retour au bricolage. Mais si les moyens fondent, les idées fusent. En Suisse, au début des années 2000, un microévénement fédère toutes les têtes chercheuses de l'époque. Elles s'appellent AntiVJ, 1024 Architecture, et viennent de la vidéo, du mix, de l'informatique, du graphisme, de l'architecture… Au Mapping Festival de Genève, qui fêtait cette année sa dixième édition, elles innovent à tout-va en croisant les techniques. « C'est la vidéo, désormais, qui commande les lumières. Plus besoin de tables de contrôle géantes, quelques pixels et un programme informatique suffisent à orchestrer le show », explique Pier Schneider, du duo parisien 1024 Architecture. Avec François Wunschel, ils sont les auteurs du Cube d'Etienne de Crécy ou du VTLZR de Vitalic, deux live électro parmi les plus marquants de la décennie. La miniaturisation offre de nouvelles perspectives. « L'idée était de réduire les ressources nécessaires pour nos projets. Il fallait que les artistes voyagent léger, qu'ils soient autonomes. Dans nos shows, la vidéo tient dans un téléphone portable », poursuit François Wunschel.
De plus en plus légers, les light shows prennent du relief, de la vitesse. Ils débordent de la scène pour plonger dans le public, comme ce glacier mouvant imaginé par AntiVJ aux Nuits sonores en 2009. Ils deviennent des œuvres à part entière dans les festivals d'art numérique qui fleurissent partout dans le monde, à égalité avec la musique qu'ils se sont longtemps contenté d'accompagner. Dernier défi en date : la 3D, qui permet une immersion totale du spectateur dans un déluge de faisceaux lumineux, à l'image de l'HyperCube, la dernière création de 1024. Reste à trouver l'« hypermusicien » capable de rivaliser avec un tel étourdissement. Jean-Michel Jarre, qui sait ? Il se dit que l'homme prépare son retour…
(1) Le dialogue est extrait d'un article d'Actuel, « Mon laser va chanter demain à la radio », signé Jean-Pierre Lentin.
(2) Le label Infiné vient de ressortir son premier album, Visions of Dune.
Source: telerama.fr
Fini le chanteur éclairé seul dans son rond de lumière... Pink Floyd dans les années 1970, Jean-Michel Jarre dix ans plus tard inventent les shows dopés aux effets lumineux. Coup de projecteur sur une révolution qui a vu le spectacle voler la vedette aux artistes.
Dès les années 1970, les Pink Floyd s'enflamment pour les light shows. - © Andrew Whittuck |
— Un quoi ?
— Des projections lumineuses, des pulsations de couleurs qui vibrent au même rythme que la musique. J'ai vu faire ça en Angleterre, je peux t'expliquer en gros comment on procède. »
Nous sommes en 1970, et Bernard Szajner ne sait pas encore qu'il deviendra bientôt le créateur des lumières de Gong et Magma (groupes historiques du rock progressif), et l'inventeur de la harpe laser, l'instrument lumineux fétiche de Jean-Michel Jarre. Pour l'instant, il discute avec son ami Karel Beer (1), manager d'un groupe de rock, et bricole dans sa cuisine des perruques en fibre de verre qui n'intéressent que lui.
Le manager a raison : en Angleterre, les light shows ont la cote depuis que Pink Floyd a décidé d'inverser les codes du concert. Ce n'est plus le chanteur qui est la vedette, mais le spectacle. Au placard Mick Jagger et autres sex-symbols envahissants. Le rock a envie d'expérience, de sensations, d'en avoir plein la vue. A Londres, le 29 avril 1967, la crème du psychédélisme a célébré « Quatorze heures de rêve en Technicolor » pour soutenir une revue underground. Au centre du vénérable Alexandra Palace trônait une tour de lumière, et la foule a dansé toute la nuit devant des écrans géants. On y diffusait Flaming Creatures, un film expérimental de Jack Smith. La même année, au club UFO, à chaque concert du Floyd, l'architecte Mike Leonard teste ses lentilles kaléidoscopiques et Peter Wynne-Willson, ses lampes à huile. Au fond de la scène, des bulles de couleur éclatent en mille particules, les musiciens jouent avec leurs ombres portées. Le public, qui ne boude pas le LSD, ouvre les portes de la perception.
Le live VTLZR, de Vitalic. - © DR |
« Soudain, l'ombre du musicien devenait gigantesque »
« Pendant des années, on avait séparé le son et la lumière, et voilà qu'ils se mariaient pour nous impressionner, pour créer l'illusion, s'enthousiasme Bernard Szajner, exactement comme les hommes des cavernes avec leurs torches ou les cérémonies de prêtres égyptiens. On le sait, la fusion des deux stimule la zone du plaisir dans le cerveau. » Alors qu'on redécouvre son travail lumineux et musical (2), quarante ans après ses débuts dans le light show, Szajner insiste pour rendre hommage aux pionniers du genre : « Sans le savoir, nous réinventions le travail d'Etienne-Gaspard Robertson, le créateur des fantasmagories sous la Révolution française, qui faisait surgir des fantômes avec de la fumée. Nous, nous mélangions des encres, de l'éther et de la glycérine sur des plaques de verre, jouions avec la persistance rétinienne, ajoutions des effets de rotation aux lanternes magiques. Soudain, l'ombre d'un musicien devenait gigantesque, effrayante. » En 1970, la technique lumineuse est presque aussi rudimentaire qu'au XVIIIe siècle, mais bientôt des moyens nouveaux décupleront ses possibilités.
« La vraie révolution du light show est arrivée avec les lampes “aircraft”, celles qui permettent aux avions d'atterrir. Elles sont petites mais ultrapuissantes », se souvient Jacques Rouveyrollis. Lui aussi maniait les ampoules vernies maison, lorsqu'il éclairait les Jelly Roll à Fréjus, en 1965. C'était avant que Michel Polnareff ne l'engage pour huit ans : « Il avait compris que les gens ne se contentaient plus d'un chanteur devant un rideau. » Le travail de Jacques Rouveyrollis, éclairagiste de Johnny, Barbara et tous les grands noms de la chanson française, accompagnera les progrès technologiques. Ils s'enchaînent à la vitesse de l'éclair.
C'est l'époque des mégashows planétaires et du Pink Floyd de The Wall. La grande ascension de Jean-Michel Jarre aussi, qui fait équipe avec Rouveyrollis et donne, le 14 juillet 1979, un concert gratuit place de la Concorde à Paris, devant un million de personnes. Le musicien français ne rechigne pas à se montrer, mais il doit faire face à un problème de taille : sa musique est instrumentale et son fatras de synthétiseurs n'est pas « sexy ». S'il ne peut pas bouger, la lumière le fera pour lui ! Jarre s'empare du laser et de la harpe inventée par Szajner, un grand triangle de métal où les cordes ont été remplacées par des rayons. Il en joue les mains gantées de métal. Rouveyrollis le suivra jusqu'à Houston, en 1986. « On passait à une autre échelle, l'éclairage d'une ville. C'est d'ailleurs peu après que les festivals de lumière sont apparus. Les Américains nous prenaient pour des fous. » Le light show passe à l'ère industrielle. Apogée de cette époque pharaonique, The Division Bell Tour des Pink Floyd, en 1994. La presse de l'époque s'extasie sur les milliers de kilowatts, les tonnes de matériel transporté et les lasers venus de la recherche nucléaire, à 120 000 dollars pièce. Démesuré ? Aux yeux de Jacques Rouveyrollis, le risque n'est pas dans la surenchère d'effets lumineux, mais dans l'absence de discours : « La finalité est toujours la même, “embarquer” les gens dans votre univers. L'important est de savoir pourquoi et pour qui on le fait. En 1984, j'ai mis quatre mille projecteurs sur la tête de Johnny. Pour Barbara, je n'avais qu'une poursuite. Si je n'ai pas de contenu, je ne peux pas faire le show. »
L'ennui pourtant gagne peu à peu l'univers du light show. A la fin des années 1990, le rock, lassé du show-business, revient à l'état brut avec le grunge. « Pour vivre heureux, vivons cachés », proclame la techno naissante, qui à l'époque tient à distance l'héritage de Jean-Michel Jarre. Mais l'euphorie des raves, du public star et de la grande communion n'a qu'un temps. Pour vivre de leur musique, les musiciens électroniques doivent exister sur scène, offrir un spectacle. Peu à peu, ils retournent donc vers la lumière.
Le Cube d'Etienne de Crecy. - © DR |
De plus en plus légers, les light shows prennent du relief, de la vitesse. Ils débordent de la scène pour plonger dans le public, comme ce glacier mouvant imaginé par AntiVJ aux Nuits sonores en 2009. Ils deviennent des œuvres à part entière dans les festivals d'art numérique qui fleurissent partout dans le monde, à égalité avec la musique qu'ils se sont longtemps contenté d'accompagner. Dernier défi en date : la 3D, qui permet une immersion totale du spectateur dans un déluge de faisceaux lumineux, à l'image de l'HyperCube, la dernière création de 1024. Reste à trouver l'« hypermusicien » capable de rivaliser avec un tel étourdissement. Jean-Michel Jarre, qui sait ? Il se dit que l'homme prépare son retour…
(1) Le dialogue est extrait d'un article d'Actuel, « Mon laser va chanter demain à la radio », signé Jean-Pierre Lentin.
(2) Le label Infiné vient de ressortir son premier album, Visions of Dune.
Sur le même thème.....vientdemee
Source: telerama.fr
11/08/2014
News | Facebook - Jean Michel Jarre
11 August 2014
Dreamer.
I'm looking...
I'm looking for my dreams...
08 august 2014
I'm a workaholic in short spurts - I'll go into the studio and work for three or four days and nights, then I'll stop, take a break, and go back to the studio a week or so later.
Dreamer.
I'm looking...
I'm looking for my dreams...
08 august 2014
I'm a workaholic in short spurts - I'll go into the studio and work for three or four days and nights, then I'll stop, take a break, and go back to the studio a week or so later.
05/08/2014
Jean Michel Jarre - News of Facebook!
03/08/2014
I have kept all of my composition notes and synth settings from down the years.
Digging them out - could be useful!
*Jean michel Jarre*
04/08/2014
Jean Michel Jarre - Children of Space
(Speeches by Arthur C.Clark)
Bernard Szajner : la harpe laser de Jean Michel Jarre, c'est lui !
05/08/2014
Son brevet est tombé dans le domaine
public. Pour son plus grand plaisir
La hache de guerre est désormais enterrée. Les deux hommes ne se sont jamais revus, mais leurs deux univers semblent condamnés à se rencontrer. Le label InFiné qui sort son disque a aussi collaboré avec Jarre… Les fans de Jarre l'ont contacté par Facebook. Ils recréent une harpe laser encore plus spectaculaire. Bernard Szajner s'en amuse : « C'est charmant parce que c'est fait gratuitement. » Son brevet est tombé dans le domaine public. Pour son plus grand plaisir. « Ils m'aident à construire mes nouveaux instruments. »
De cette époque, il reste peu de photos, mais beaucoup d'articles, dont celui de Jean-Pierre Lentin dans Actuel (Mon laser va chanter demain dans ta radio). Il y est question d'un mec à tête de Nosferatu qui se fend la pipe, de flash, d'hologramme, et de toute une époque où l'électronique tâtonnait dans le noir. Comme lui à sa naissance.
C'était en 1944, et il ne faisait pas bon naître juif dans la France de Vichy. Bernard Szajner passera ses premiers mois caché dans une cave. « Mon père m'a raconté que nous vivions dans l'obscurité totale, à l'exception de la lumière du soupirail, le jour. Impossible d'allumer la nuit, évidemment, nous aurions été repérés immédiatement. » A la libération, ils ont enfin pu se servir de la lampe suspendue au plafond. Elle faisait un clic. Du son et de la lumière. Szajner a longtemps refusé de raconter cette histoire, avant d'en comprendre le lien avec sa vie de créateur. « Ça faisait tellement accroche pour journaliste, je n'aimais pas cette idée. »
Bernard Szajner, Almeeva, Laurence Lenoir : Evolution. Spectacles et concerts, le 18 septembre 2014, à 20h30, au Centre Pompidou, Paris.
Il ne savait jouer d'aucun
instrument, mais inventa celui qui illumina les spectacles de Jean
Michel Jarre.
Et vit son invention lui échapper. Histoire d'un créateur
discret et de la genèse de sa syringe.
Jean-Michel Jarre en concert à Paris-Bercy en 2010. - Niviere/Sipa |
L'expression parle de l'arbre qui cache la forêt. Bernard Szajner,
lui, a vécu dans l'ombre d'une harpe. Une harpe laser, la syringe,
instrument lumineux qu'il inventa dans les années 1980 et qui fit le
tour du monde avec une vedette, Jean Michel Jarre, au point d'éclipser son créateur. Et avec lui toute son œuvre.
Bernard Szajner est une de ces figures oubliées que les générations nouvelles aiment redécouvrir. Compagnon de route de Magma ou Gong, groupes mythiques et adulés du rock des années 1970, il est un pionnier du lightshow, ces spectacles lumineux qui enflammèrent les années psychédéliques ; un pionnier de la musique synthétique française également, auteur d'albums totalement méconnus ici ; pionnier, enfin, de la robotique mais régulièrement négligé dans les articles. « Je l'ai un peu cherché peut-être, modère-t-il, j'aime bien vivre caché. D'ailleurs je travaille rideaux fermés. »
A la Rochelle, où il vit en ce moment, il a ramené ses vis, ses joints et ses minuscules boulons, tous rangés dans leur petit tiroir au milieu d'un capharnaüm : oiseau mécanique éventré, réglette de fer en attente d'un chalumeau, câbles et lanternes magiques chinés dans une brocante. Bernard Szajner prépare une performance, un nouveau lightshow musical qu'il doit présenter à Beaubourg en septembre 2014. Il réfléchit aussi à un projet avec l'IRCAM et savoure la réédition de son premier album, Visions of Dune, sur le label InFiné. Le reste du temps, il vit à Londres, où sa musique a toujours été mieux appréciée, même si là-bas aussi, on l'avait un peu oublié.
Discret Szajner dont le nom, en France, a longtemps circulé entre passionnés de musique électronique sans que personne ne cherche à aller plus loin. Au mieux, une compilation pouvait parfois lui rendre hommage (So young but so cold, Tigersushi en 2004). Jusqu'à ce qu'un jour, Carl Craig, demi-dieu de la techno, le cite dans une de ces listes dont raffolent les magazines musicaux. Et voilà Bernard Szajner ressuscité grâce à cette place de numéro 1 sur le podium de Craig.
Ce disque, Some Deaths take forever, il l'avait composé pour Amnesty International en 1980. Ardu, inquiétant, sombre à souhait, c'est un concentré de Szajner qui ne déteste rien de plus que la musique jolie. « Je me rappelle, Christian Vander, de Magma disait souvent que chaque note devait peser des tonnes. Il avait raison. Il disait aussi : “Quand on s'habille en noir, on ne porte pas de slip blanc”. » Pourquoi serait-on sinistre quand on est radical ?
Bernard Szajner est une de ces figures oubliées que les générations nouvelles aiment redécouvrir. Compagnon de route de Magma ou Gong, groupes mythiques et adulés du rock des années 1970, il est un pionnier du lightshow, ces spectacles lumineux qui enflammèrent les années psychédéliques ; un pionnier de la musique synthétique française également, auteur d'albums totalement méconnus ici ; pionnier, enfin, de la robotique mais régulièrement négligé dans les articles. « Je l'ai un peu cherché peut-être, modère-t-il, j'aime bien vivre caché. D'ailleurs je travaille rideaux fermés. »
A la Rochelle, où il vit en ce moment, il a ramené ses vis, ses joints et ses minuscules boulons, tous rangés dans leur petit tiroir au milieu d'un capharnaüm : oiseau mécanique éventré, réglette de fer en attente d'un chalumeau, câbles et lanternes magiques chinés dans une brocante. Bernard Szajner prépare une performance, un nouveau lightshow musical qu'il doit présenter à Beaubourg en septembre 2014. Il réfléchit aussi à un projet avec l'IRCAM et savoure la réédition de son premier album, Visions of Dune, sur le label InFiné. Le reste du temps, il vit à Londres, où sa musique a toujours été mieux appréciée, même si là-bas aussi, on l'avait un peu oublié.
“J'ai toujours peur qu'on me prenne
pour un illuminé ou un gourou”
pour un illuminé ou un gourou”
Ce disque, Some Deaths take forever, il l'avait composé pour Amnesty International en 1980. Ardu, inquiétant, sombre à souhait, c'est un concentré de Szajner qui ne déteste rien de plus que la musique jolie. « Je me rappelle, Christian Vander, de Magma disait souvent que chaque note devait peser des tonnes. Il avait raison. Il disait aussi : “Quand on s'habille en noir, on ne porte pas de slip blanc”. » Pourquoi serait-on sinistre quand on est radical ?
Bernard Szajner dans les années 1980. |
Szajner travaille quelques années avec Magma. Il imagine les lightshows qui accompagnent leurs concerts. Les premiers à faire ça étaient anglais ou américains. The Grateful Dead ou Pink Floyd. C'est l'époque de la lampe à huile, des mélanges éther-glycérine-encre qu'on s'échange entre spécialistes. « On recréait sans le savoir des lanternes magiques, comme celle de Robertson, génial inventeur des fantasmagories et du fantascope au XVIIIe siècle. Je jouais avec la persistance rétinienne, je créais les mêmes illusions en mouvement. Nous recherchions la fusion parfaite entre le son et la musique, parce que les deux ensemble deviennent encore plus puissants, c'est la troisième force de la synergie. » Il rigole. « Mon but, c'est d'atteindre l'élévation, pour moi et pour le public. J'ai toujours peur qu'on me prenne pour un illuminé ou un gourou, mais c'est une démarche généreuse, pas manipulatrice. »
Quand la lumière commande la musique
Suivront Gong, puis The Who un peu plus tard, quand le laser fera son apparition. Bernard Szajner, dont le goût pour les inventions et le bricolage trouve ici un formidable terrain de jeu, devient une référence dans le domaine. Pink Floyd et leurs concerts sensoriels sont la référence. Tous les groupes veulent rivaliser avec eux, dont The Who. « Eux m'ont fait souffrir. Leur road manager m'a fait louer deux lasers, venir en Angleterre et a confisqué mes papiers à mon arrivée en me disant : “Maintenant tu m'obéis, et si t'es sage on te redonnera tout à la fin, et on te paiera un peu.” Un vrai bandit. Je me suis retrouvé à faire le manipulateur pendant leur tournée. Les musiciens n'en savaient rien. Je suis sûr qu'il leur a dit que j'avais demandé une fortune et qu'il s'est mis la différence dans la poche. »
Lassé de voir son travail de lumière réduit à une simple illustration, Bernard Szajner décide de faire route en solitaire. Puisque les musiciens négligent son œuvre, il va créer la musique qui accompagne ses lumières. La harpe laser naît en 1980. Il l'appelle la syringe. C'est une inversion complète de l'ordre des choses. Ce n'est plus la musique qui commande la lumière, mais la lumière qui commande la musique grâce aux cordes-rayons verts, qui activent un synthétiseur. « Il fallait que je trouve un instrument qui me convienne, alors que je ne sais jouer de rien. En fait, c'était une démarche paresseuse. »
L'invention fait grand bruit. Et attire l'attention de Dreyfus, producteur de Jean Michel Jarre qui l'utilisera dès 1981 pour ses spectacles, dont le célèbre show en Chine. Szajner espère une reconnaissance, dans le sillage de la vedette. Il n'en sera rien. Pour le monde entier, la harpe laser, c'est Jarre. Qui ne contredit pas. Déception, rancune, Bernard Szajner finit par détruire sa harpe personnelle. « L'objet était trop visuel et je cherche l'équilibre parfait. Je n'aime pas le spectaculaire et j'avais créé un instrument qui l'était. »
Quand la lumière commande la musique
Suivront Gong, puis The Who un peu plus tard, quand le laser fera son apparition. Bernard Szajner, dont le goût pour les inventions et le bricolage trouve ici un formidable terrain de jeu, devient une référence dans le domaine. Pink Floyd et leurs concerts sensoriels sont la référence. Tous les groupes veulent rivaliser avec eux, dont The Who. « Eux m'ont fait souffrir. Leur road manager m'a fait louer deux lasers, venir en Angleterre et a confisqué mes papiers à mon arrivée en me disant : “Maintenant tu m'obéis, et si t'es sage on te redonnera tout à la fin, et on te paiera un peu.” Un vrai bandit. Je me suis retrouvé à faire le manipulateur pendant leur tournée. Les musiciens n'en savaient rien. Je suis sûr qu'il leur a dit que j'avais demandé une fortune et qu'il s'est mis la différence dans la poche. »
Lassé de voir son travail de lumière réduit à une simple illustration, Bernard Szajner décide de faire route en solitaire. Puisque les musiciens négligent son œuvre, il va créer la musique qui accompagne ses lumières. La harpe laser naît en 1980. Il l'appelle la syringe. C'est une inversion complète de l'ordre des choses. Ce n'est plus la musique qui commande la lumière, mais la lumière qui commande la musique grâce aux cordes-rayons verts, qui activent un synthétiseur. « Il fallait que je trouve un instrument qui me convienne, alors que je ne sais jouer de rien. En fait, c'était une démarche paresseuse. »
L'invention fait grand bruit. Et attire l'attention de Dreyfus, producteur de Jean Michel Jarre qui l'utilisera dès 1981 pour ses spectacles, dont le célèbre show en Chine. Szajner espère une reconnaissance, dans le sillage de la vedette. Il n'en sera rien. Pour le monde entier, la harpe laser, c'est Jarre. Qui ne contredit pas. Déception, rancune, Bernard Szajner finit par détruire sa harpe personnelle. « L'objet était trop visuel et je cherche l'équilibre parfait. Je n'aime pas le spectaculaire et j'avais créé un instrument qui l'était. »
Son brevet est tombé dans le domaine
public. Pour son plus grand plaisir
La hache de guerre est désormais enterrée. Les deux hommes ne se sont jamais revus, mais leurs deux univers semblent condamnés à se rencontrer. Le label InFiné qui sort son disque a aussi collaboré avec Jarre… Les fans de Jarre l'ont contacté par Facebook. Ils recréent une harpe laser encore plus spectaculaire. Bernard Szajner s'en amuse : « C'est charmant parce que c'est fait gratuitement. » Son brevet est tombé dans le domaine public. Pour son plus grand plaisir. « Ils m'aident à construire mes nouveaux instruments. »
De cette époque, il reste peu de photos, mais beaucoup d'articles, dont celui de Jean-Pierre Lentin dans Actuel (Mon laser va chanter demain dans ta radio). Il y est question d'un mec à tête de Nosferatu qui se fend la pipe, de flash, d'hologramme, et de toute une époque où l'électronique tâtonnait dans le noir. Comme lui à sa naissance.
C'était en 1944, et il ne faisait pas bon naître juif dans la France de Vichy. Bernard Szajner passera ses premiers mois caché dans une cave. « Mon père m'a raconté que nous vivions dans l'obscurité totale, à l'exception de la lumière du soupirail, le jour. Impossible d'allumer la nuit, évidemment, nous aurions été repérés immédiatement. » A la libération, ils ont enfin pu se servir de la lampe suspendue au plafond. Elle faisait un clic. Du son et de la lumière. Szajner a longtemps refusé de raconter cette histoire, avant d'en comprendre le lien avec sa vie de créateur. « Ça faisait tellement accroche pour journaliste, je n'aimais pas cette idée. »
A voir
Bernard Szajner, Almeeva, Laurence Lenoir : Evolution. Spectacles et concerts, le 18 septembre 2014, à 20h30, au Centre Pompidou, Paris.
Source: telerama.fr
Jean Michel Jarre - 6 JULY 2014
Bernard Szajner, Denis Carnus, Philippe Guerre, Claude Lifante, Yan Terrien, are the great engineers that have created a laser harp for me in the past.
(Jean Michel Jarre)
June 26, 2014
Bernard Szajner’s cult synth classic Visions Of Dune gets first ever vinyl reissue; stream an exclusive Andy Votel mini-mix here
French electronic music pioneer has his alternative soundtrack to Frank Herbert’s cult sci-fi novel Dune remastered from original tapes by legendary Berlin engineer Rashad Becker.
Zed aka Bernard Szajner’s 1979 masterpiece Visions of Dune is to be reissued on vinyl for the very first time by InFiné Music to include two lost pieces from the original sessions deemed by Pathé Marconi EMI to be “too futurist” for the initial release.
Composed intuitively over the course of eight days using only a borrowed Oberheim sequencer and an Akaï four-track, Szajner created a series of what he called “mental impression[s] of a character, a situation or a concept” from Herbert’s novel. The result was a quite brilliant amalgam of deeply layered sci-fi soundscapes that drift between the ambient drones which earned him the title of the “French Brian Eno” and more tripped-out percussive grooves, redolent of the kosmische stylings of his contemporaries across the Alsace.
Speaking of the concept behind the record, Szajner said: “Just as a novel is a continuity of words, which form a continuity of sentences, which together form the continuity of the story; I assembled my words and phrases (notes, sounds and loops) in a continuity which to me formed an “auditory film,” a “transposed imaging” of the novel, which explains why the sounds are linked one to another without any real cuts separating one track from another, all forming one continuity, with the exception of the physical demand posed by the fact that, vinyl discs having two sides, it was impossible for me to create one single and unique continuity — I was forced to “divide” my “musical story” in two.”
To accompany the release, Finders Keepers co-founder, DJ, producer and all-round custodian of experimental music Andy Votel has assembled a similarly continuous mini-mix from Visions of Dune, which you can stream exclusively below:
Zed aka Bernard Szajner’s 1979 masterpiece Visions of Dune is to be reissued on vinyl for the very first time by InFiné Music to include two lost pieces from the original sessions deemed by Pathé Marconi EMI to be “too futurist” for the initial release.
Composed intuitively over the course of eight days using only a borrowed Oberheim sequencer and an Akaï four-track, Szajner created a series of what he called “mental impression[s] of a character, a situation or a concept” from Herbert’s novel. The result was a quite brilliant amalgam of deeply layered sci-fi soundscapes that drift between the ambient drones which earned him the title of the “French Brian Eno” and more tripped-out percussive grooves, redolent of the kosmische stylings of his contemporaries across the Alsace.
To accompany the release, Finders Keepers co-founder, DJ, producer and all-round custodian of experimental music Andy Votel has assembled a similarly continuous mini-mix from Visions of Dune, which you can stream exclusively below:
An effusive advocate of Szajner’s influence, Votel said: “As a long-time fixture at the far-end of my Euro-electronic shelf this Gallic-magnetic conceptual synth-pop classic has been in risky disc-jockey orbit waiting over 30 years for the right time to touch-down on planet earth to re-fuel… Few LPs manage to successfully connect so many important dots in French outer-rocks vast colouring book where Igor Whakhevitch meets Jean Michel Jarre via Massiera, Gilbert Deflez, Hydravion and Artefact… Zed however paints every page black (and silver) and is still one leaf ahead.”
A visual artist who initially made his name with innovative lighting shows for the likes of Gong and Magma, Visions Of Dune was Szajner’s lost opus, reissued now on vinyl for the very first time. Going on to become a pioneer of robotics, creating a laser harp that he would use live on stage, it’s not hard to see why Carl Craig, among other high-profile admirers, counts Szajner’s music as being in his “all time top ten”.
Complete with new Arnau Pi-designed sleeve, Zed aka Bernard Szajner’s Visions Of Dune will be released on 25th August via InFiné Music.